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20 février 2007 2 20 /02 /février /2007 21:20

L’accord de la Mecque : un accord qui ne sert (presque) à rien

Par Sami El Soudi


Abbaseul
© Metula News Agency











Mahmoud Abbas aux dirigeants du Hamas : "Ils ne marcheront pas ! Je vous invite à accepter les trois conditions du Quartet, sans cela, personne ne nous renouvellera son aide économique"



 

 

Le plus serein des trois participants à la rencontre d’hier à Jérusalem, c’était Mahmoud Abbas. Il avait, pour l’occasion, renfilé son complet d’agent immobilier qui s’efforce de vendre les propriétés de tiers. Le costume de l’intermédiaire avec lequel vous signez le contrat et qui vous jure qu’il n’y est pour rien lorsque vous ne recevez pas la maison que vous avez payée. Hier, face à la Secrétaire d’Etat Condoleezza Rice et au premier ministre Olmert, visiblement irrités par sa conduite, Abbas a répété la même litanie : j’ai fait ce que je pouvais faire de mieux, c’est ainsi qu’il faut considérer l’accord de la Mecque.

 

Après avoir rappelé à ses hôtes que la situation militaire du Fath dans la bande de Gaza n’est pas des meilleures contre les miliciens intégristes et que cela ne le dérangeait pas de gagner du temps qui lui sert à renforcer son potentiel sécuritaire, le président de l’Autorité Palestinienne est revenu sur son idée force.

 

C’est la même idée que celle qu’il avait présentée au souverain saoudien puis martelée aux oreilles des dirigeants du Hamas : "Ils ne marcheront pas ! Je vous invite à accepter les trois conditions du Quartet, sans cela, personne ne nous renouvellera son aide économique".

 

Et Abou Mazen, depuis la signature, de jouer le mort, comme au bridge. Ils ont proposé un gouvernement à nouveau dirigé par Hanya et le Hamas, appelé gouvernement d’"union nationale", ainsi soit-il ! Abbas, à la Mecque, avait toutefois mis ses hôtes en garde sur le fait que ce qui empêche la communauté internationale de lever son boycott, ce n’est pas la composition d’un cabinet palestinien quel qu’il soit mais sa reconnaissance des trois principes clés : reconnaissance des accords déjà signés entre l’AP et Israël, reconnaissance du droit de l’Etat hébreu à l’existence et abandon de la violence et de la terreur.

 

Le successeur d’Arafat avait énoncé un principe valide, puisque Ehoud Olmert n’a nullement contesté le droit du Hamas de siéger dans un gouvernement, voire de le diriger. Le premier ministre israélien a simplement dit que son pays n’entretiendrait aucun contact avec un gouvernement palestinien qui n’accepterait pas les conditions du Quartet. Il a précisé que sa décision incluait la mise en quarantaine des membres mesurés d’un tel cabinet, comme Salam Fayad, pressenti aux finances.

 

La position de l’Amérique est similaire à celle de Jérusalem. Ainsi, dimanche soir, Madame Rice a expliqué à des journalistes que si un Etat palestinien devait voir le jour, les principes du Quartet devaient être endossés, parce qu’ils constituent les fondations de la paix. Donc pas de rejet, a priori, en tant que telle, d’une participation intégriste.

 

Mais la Secrétaire d’Etat a ensuite fait état de ses craintes en remarquant "je n’ai rien aperçu à ce jour qui puisse suggérer qu’il s’agirait d’un gouvernement qui va adopter les principes du Quartet", complétant, pragmatique et patiente, "mais nous allons bien voir lorsque le gouvernement sera formé !".

 

Alors, comme l’a averti Abbas, le gouvernement en voie de constitution ne résoudra pas le problème des Palestiniens, puisque les dirigeants du Hamas clament à qui veut bien les écouter que leur organisation n’a aucunement l’intention de reconnaître Israël. Alors l’argent, vital pour faire régner l’ordre, pour nourrir le peuple et pour éviter la guerre civile ne viendra pas.

 

Et gare à tous les ferments de ces maux qui se sont seulement auto-anesthésiés en attendant la suite. Lorsqu’ils constateront que la création du gouvernement d’union nationale n’aura servi à rien, que les traitements des 140 000 fonctionnaires demeureront impayés, le processus de désintégration de la Palestine reprendra de plus belle.

 

Mais la faute ne sera pas imputable à Abou Mazen ni au Fatah, qui ont honnêtement adopté l’initiative de Khaled Mashal, sur proposition d’Abdallah d’Arabie. Mieux encore, Mahmoud Abbas va entreprendre, dès aujourd’hui, un road show européen, destiné à vendre aux Allemands, aux Anglais et aux Français les aspects positifs de l’accord de la Mecque.

 

Cela se fera sans enthousiasme toutefois. Même Saëb Erekat – le diplomate de l’OLP – reconnaissait, réaliste, que "Rice et Olmert avaient réitéré les "conditions" à Abbas", commentant, à propos d’un possible compromis autour des dispositions de la Mecque, qu’"il ne pensait pas que nous disposons de la moindre marge de manoeuvre".

 

Dans un mois, deux au grand maximum, Mahmoud Abbas – devant les robinets à sec de l’aide internationale – demandera à Mashal : "Et maintenant, que fait-on ?". Le chef de la résistance islamique aura alors le choix entre  trois réponses :

 

  1. On modifie les concepts du Hamas : ce qui signifierait, indirectement, la fin de cette organisation, qui perdrait sa raison d’être : le refus d’une cohabitation avec Israël.

 

  1. On convoque des élections anticipées, qui ne changeraient quelque chose que si le Fatah les remportait. Il faudrait donc que le Hamas espère une victoire de son adversaire, ce qui est pour le moins incongru.

 

  1. On se renferme sur soi-même et sur le déraisonnable, Mashal imputant les raisons de son échec aux rapaces américains, aux sionistes et aux traîtres palestiniens, entendez Abbas et le Fath’, et là, on retombe dans la guerre civile, mais à la puissance 10.

 

En fait, Mahmoud Abbas, depuis qu’il a signé le traité de la Mecque, mise sur l’alternative 2 tout en se préparant à la 3. Car la perduration du gouvernement d’union nationale ne créerait pas uniquement une impossibilité de parvenir à la paix : elle impliquerait également le renoncement à la création d’un Etat palestinien dans le cadre de l’option des deux Etats pour deux peuples distincts. Puisque le seul Etat palestinien que le Hamas est prêt à envisager, c’est celui – dramatiquement utopique – que nous construirions sur les cendres d’Israël et de ses 6 millions d’habitants juifs.

 

Et puis, ce qui est tout aussi suicidaire pour le Fatah : le succès du gouvernement d’union serait synonyme de l’abandon par Abbas et ses amis de leur mainmise absolue sur les finances de la cause palestinienne, ainsi que leur accord à l’intégration des miliciens islamiques dans les forces de sécurité nationales. On irait également – c’est une autre exigence des intégristes – vers leur entrée à la "Commission exécutive de l’OLP", c’est-à-dire, dans l’instance suprême régissant la cause palestinienne.

 

Or il va de soi, pour quiconque est un brin familier des arcanes de l’OLP, qu’aucune de ces perspectives n’est envisageable pour ses membres, et qu’il s’agit de sujets à ce point cruciaux que la survie du Fatah en dépend. Et, en corollaire de cette survivance, la continuation même de l’existence d’une "cause nationale palestinienne". 

 

Pour ne rien arranger, puisque c’est le Hamas qui a enlevé le caporal israélien Gilad Shalit et qui le maintient en détention ; puisque c’est le Hamas qui creuse la majorité des trous de contrebande sous la frontière avec l’Egypte, et puisque le Hamas dirigera le nouveaux gouvernement palestinien, Jérusalem exige dudit gouvernement, avant même sa formation, qu’il libère "immédiatement" son soldat et qu’il mette un terme aux activités de contrebande à Rafah contraires aux traités signés.

 

L’ordre du jour de la réunion d’hier avait été revu à la baisse par les Américains. Il ne fut plus du tout question de "relancer le processus de paix", mais d’échanger des vues de manière informelle. Ce qui n’a pas empêché Mme Rice et messieurs Abbas et Olmert, de se tenir par les mains et de confirmer, un franc sourire aux lèvres, "leur engagement pour la solution des deux Etats" ainsi que leur "compréhension commune de ce qu’un Etat palestinien ne pouvait pas voir le jour dans la violence et la terreur".

 





 

Dans la même compréhension de la situation

 

Qui a lu cet article comprendra que, loin d’être une formule de diplomatie ou un message passe-partout, dans la situation qui prévaut, ces deux phrases constituent au moins une déclaration de politique commune, si ne n’est la moitié d’une déclaration de guerre différée au Hamas.

 

La Secrétaire d’Etat a aussi confié, lors de son séjour dans notre région et au vu des événements, que "l’Etat palestinien ne verrait peut-être pas le jour avant la fin du mandat de George W. Bush". Lorsqu’une femme dit "peut-être", c’est souvent bon signe pour l’homme qui la courtise, mais lorsqu’un secrétaire d’Etat le dit, si séduisante soit-elle, cela signifie que notre émancipation n’est toujours pas pour demain.

 

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